Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/545

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certitude que je ſuis amoureux de Leoniſe. Puis qu’il faut le dire, repliqua t’il, c’eſt que Cleodore qui vous croit jaloux de moy, & qui s’imagine que vous feignez d’aimer Leoniſe pour luy faire dépit, vous aime encore mille fois plus qu’elle ne doit : de ſorte que quelque paſſion que j’aye pour elle, je ſuis aſſuré que je ne toucheray jamais ſon cœur, que je ne vous en aye chaſſé. Obligez la ſi vous pouvez à me haïr, parce qu’elle vous aimera trop, repliqua Beleſis ; mais de grace ne ſongez pas à vous en faire aimer, parce qu’elle me haïra, Il me ſemble, dit Hermogene en ſous-riant, que cette delicateſſe eſt un peu chimerique : car enfin vous aimez Leoniſe, ou vous ne l’aimez pas : ſi vous ne l aimez pas, il faut me dire poſitivement que vous aimez touſjours Cleodore, & que vous voulez eſtre mon ennemy, puis que je ſuis voſtre Rival : mais ſi au contraire vous aimez Leoniſe, je ne voy pas pourquoy vous faites difficulté de me permettre de dire une choſe à Cleodore, qui me peut ſervir aupres d’elle, & qui vous delivrera ſans doute de ſon affection : car je ſuis perſuadé, que quand ce ne ſeroit que pour ſe vanger, elle m’en traitera moins mal. Cependant afin de ne vous déguiſer rien, ſi vous ne m’accordez ce que je dis, elle voudra que je ne la voye plus, & que je ne l’aime plus : & alors Hermogene raconta à Beleſis ce qui c’eſtoit paſſé entre Cleodore & luy. Pendant qu’il parloit, il remarqua une agitation eſtrange dans ſon eſprit, quoy qu’il n’en compriſt pas bien la raiſon : ſi ce neſtoit la honte qu’il avoit d’eſtre connu pour inconſtant. Mais enfin (luy dit il, apres luy avoir tout raconté) il faudra bien que Cleodore vienne un jour à sçavoir que vous ne l’aimez plus, & que vous aimez Leoniſe : cela eſtant, ne