Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/92

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qui : quant à la Princeſſe, elle creût que c’eſtoit de quelque belle Perſonne, qui eſtoit à, Claſomene : & que la melancolie que l’on voyoit dans ſon eſprit, n’avoit point d’autre cauſe que l’abſence. Mais pour Doraliſe, qui pour ſe divertir l’obſervoit plus ſoigneusement, elle ſoutint touſjours que ce n’eſtoit point à Claſomene qu’il aimoit : & en effet il fut aiſé de le connoiſtre avec certitude : car le Prince de Claſomene ayant voulu l’y envoyer, pour une affaire tres importante, nous sçeuſmes qu’il s’en eſtoit excuſé avec empreſſement, & qu’enfin il n’y avoit point voulu aller : ſi bien qu’il fut aiſé de juger apres cela, que ſi Perinthe aimoit, il faloit que ce fuſt à Sardis. Ce qui embarraſſoit touteſfois la Princeſſe, eſtoit qu’il ne paroiſſoit avoir attachement aucun pour perſonne : il voyoit Doraliſe tres ſouvent : mais quoy qu’il euſt beaucoup de reſpect : pour elle, nous n’y voiyons point de marques de paſſion : ainſi Perinthe ceſſa de paſſer pour inſensible, ſans que l’on ſoubçonnaſt pourtant rien de la veritable cauſe de ſon amour.

En ce temps là, le Prince Atys eſpousa Anaxilée, dont je penſe vous avoir dit qu’il eſtoit amoureux : ſi bien que les Feſtes & les reſjoüiſſances recommencerent dans la Cour. Neantmoins quoy que Mexaris euſt entendu de la bouche de la Princeſſe qu’il aimoit, qu’elle avoit averſion pour les avares, il n’en fut guere plus magnifique : il fit pourtant quelque choſe de plus qu’il n’avoit accouſtumé : mais ce fut de ſi peu, qu’à peine s’en aperçeut on. Le Prince Atys, Arteſilas, Adraſte, Cleandre, & Abradate, firent auſſi cent choſes par emulation, où ils taſcherent de ſe vaincre : mais pour Mexaris, il ne ſe ſoucia pas d’eſtre touſjours vaincu en magnificence, & de voir touſjours ſon Rival vainqueur. En effet, ſi