Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/186

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de Grece. Nous eusmes pourtant le malheur de ne l’y trouver plus ; bien est-il vray qu’Artamene eut du moins l’avantage, d’y faire amitié particuliere, avec un Prince nommé Philoxipe, de grand esprit, & de grande vertu. Mais comme je ne veux pas m’estendre, sur toutes les rencontres de nostre voyage, & que je ne le vous raconte qu’afin que vous vous estonniez moins, des grandes choses que mon Maistre a faites, dans une si grande jeunesse ; je reserveray pour quelques autres occasions, plusieurs petites avantures qu’il eut, aux divers lieux où nous passasmes. Ainsi sans vous particulariser ce grand nombre d’Isles que nous vismes dans la Mer Egée, je vous diray seulement qu’apres nostre retour à Athenes, où mon Maistre avoit promis à Pisistrate de retourner ; nous fusmes à Lacedemone, de qui le gouvernement ne luy pleut pas ; cette grande Ame ne pouvant s’imaginer, que deux Rois peussent compatir ensemble ; elle qui auroit trouvé toute la Terre trop petite, pour assouvir pleinement son ambition. Nous fusmes en suitte à Delphes, à Argos, à Micenes, & à Corinthe, où le sage Periandre nous reçeut magnifiquement. Car cét excellent Homme est persuadé, que le droit d’Hospitalité, doit estre un des plus inviolables : & qu’ainsi l’on ne peut faire trop d’honneur aux Estrangers. Aussi voulut il que la Princesse Cleobuline sa Fille, de qui la beauté, la sagesse, & le sçavoir, l’ont renduë celebre par toute la Grece, ne refusast pas sa conversation à Artamene : qui estoit devenu sçavant en la langue Grecque, qu’il pouvoit estre pris, pour originaire de ce Païs là. Periandre luy fit mesme entendre pour le regaller, ce fameux Musicien nommé Arion, que de l’Istme de Corinthe, à porté sa reputation