de tout soubçon par cét artifice, que je luy en parlay le premier : & le priay mesme de la vouloir visiter quelquefois. Il s’en deffendit avec opiniastreté : & en effet, il fut plusieurs jours sans la vouloir voir chez elle. Mais pour mon malheur, je sçeu depuis qu’il l’avoit veuë trois fois au Temple : deux fois à la promenade dans les Jardins du Roy : & une encore aux bords de l’Oronte, où elle alloit assez souvent. Voyant donc combien Arbate me paroissoit esloigné d’avoir aucun dessein pour Amestris ; je continuois à luy parler de ma passion, & à luy demander conseil : & comme je luy disois que je n’avois pû profiter entierement de celuy qu’il m’avoit donné, de descouvrir mon amour le plus tost que je pourrois, à celle qui l’avoit fait naistre, parce qu’elle en évitoit les occasions : Lors que je vous conseillay, me respondit le malicieux Arbate, de vous haster de parler de vostre passion à Amestris, je ne la connoissois pas encore : Mais Dieux, Aglatidas, s’escria t’il, que j’ay bien changé de sentimens en la voyant ! & que cette extréme modestie, que j’ay remarquée sur son visage, m’a bien fait connoistre, qu’il ne faut pas vous exposer legerement, à luy descouvrir vostre dessein ! Croyez moy, reprit cét infidelle Amy, ne songez point à parler d’amour à Amestris, que vous ne luy ayez rendu cent & cent services : & que vous ne l’ayez mise en estat de ne pouvoir vous maltraiter sans ingratitude. Ce chemin est bien long, luy dis-je : ouy, me respondit-il, mais il est bien assuré, & l’autre est bien dangereux. Car enfin, poursuivit-il, si elle se fasche, lors que vous luy descouvrirez vostre passion ; qu’elle vous deffende de la voir ;
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