Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/460

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donc trouvé seul aupres d’Amestris, je remarquay qu’elle changea de couleur plus d’une fois : & je m’imaginay, comme il estoit vray, qu’elle sçavoit deja quelque chose de l’intention d’Attambare, touchant nostre mariage : comme en effet, il luy en avoit parlé, une heure avant que j’arrivasse aupres d’elle. Mais helas Seigneur, que cét aimable incarnant en l’embellissant, me donna d’estrangges inquietudes ! & que je craignis fortement, qu’elle n’eust de l’aversion, pour ce que je m’imaginois qu’on luy avoit proposé ! Madame, luy dis-je presque en tremblant, Aglatidas oseroit-il bien prendre la liberté, de demander à la belle Amestris, si les divers changemens qu’il voit sur son visage, sont d’un bon ou d’un mauvais presage pour luy ? Je pensois, dit-elle en rougissant encore plus fort, avoir entendu dire à nos Mages, que les hommes ne devoient consulter que les Astres, pour s’informer de leur fortune : & ne s’amuser pas à de si petites, & de si legeres observations. Je pense, luy repliquay-je, que ceux qui ont dessein de sçavoir s’ils seront riches, ou s’ils seront heureux à la guerre, doivent faire ce que vous dittes : mais je crois aussi que ceux qui ne veulent sçavoir autre chose, que ce qui se passe dans le cœur de l’adorable Amestris, ne doivent consulter que ses yeux : & ne doivent aprendre que d’eux, leur bonne ou leur mauvaise fortune. Amestris, me respondit elle, n’est pas assez considerable, pour faire le malheur, ou la felicité de quelqu’un : Mais quand cela seroit, Aglatidas la doit assez connoistre, pour croire qu’elle ne cherchera pas mesme la sienne, que par la volonté de ceux qui doivent raisonnablement disposer d’elle. Mais Madame, adjoustay-je, si ceux que vous dittes, souhaittoient de vous une chose, ou vous eussiez