Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/556

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haï ! Ha s’il est ainsi, il faut que ses parens ou le Roy, l’ayent contrainte de consentir à cét estrangge mariage. Point du tout, reprit Menaste, & vous y avez beaucoup plus de part que personne. Moy, repris-je tout estonné, j’auray marié Amestris ! Je vous avoüe bien (poursuivis-je, sans sçavoir presque ce que je disois) que je l’aurois encore plustost mariée à Otane qu’à Megabise : Mais apres tout, sçachez Menaste, qu’Aglatidas est incapable d’avoir marié Amestris : & que s’il avoit pû disposer de sa volonté, ç’auroit esté a son avantage. Ouy, reprit Menaste, auparavant que la beauté d’Anatise, eust effacé de vostre cœur celle d’Amestris : Anatise, luy repliquay-je avec precipitation, n’a jamais eu de place en mon ame : & Amestris, l’infidelle Amestris, y a tousjours regné Souverainement. Menaste n’estant pas alors moins estonnée de m’entendre parler ainsi ; que je l’estois d’aprendre qu’Amestris estoit mariée ; me demanda s’il estoit bi ? vray, que j’aimasse encore Amestris ? Ouy Menaste, luy dis-je, je l’aime encore : & quoy que mes propres yeux m’ayent fait voir des choses, que je ne croyois jamais voir ; je ne laisse pas de l’adorer tousjours. L’amour d’Anatise n’a esté qu’une feinte, & un effet de mon desespoir : Mais Menaste, poursuivis-je, aprenez moy qui peut avoir mis Megabise & Amestris mal ensemble : & qui peut l’avoir obligé à espouser Otane. Megabise, me dit-elle, n’a jamais esté bien avec Amestris : Ha Menaste, luy repliquay-je, vous n’avez pas vû ce que j’ay veû ! Ha Aglatidas, reprit-elle, vous ne sçavez pas ce que je sçay ! Mais admirez Seigneur, quels estrangges effets l’Amour produisit en mon ame : la seule nouvelle du mariage d’Amestris, m’auroit sans doute infiniment