Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/205

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tout le monde estoit content : Thomins estoit ravie de voir Artamene dans sa Cour : ces deux Princes Estrangers estoient aussi bien aises de faire amitié avec un homme si illustre : toute la Cour en general, prevoyant bien que la presence d’Artamene augmenteroit les divertissemens, s’en resjouïssoit : ce Peuple qui aime naturellement les hommes vaillans, regardoit Artamenc avec plaisir : & mon Maistre luy mesme esperant de bien reüssir en son dessein, veû la maniere dont on l’avoit reçeu ; n’avoit point d’autre inquietude, que celle de l’absence & de sa passion, qui a dire vray estoit assez forte : mais qui estoit pourtant un peu soulagée, par l’esperance d’un prompt & d’un heureux retour. Cependant pour ne perdre point de temps, durant qu’il faisoit semblant de songer à negocier avec le Conseil de la Reine, des affaires qui estoient le pretexte de son voyage, c’est à dire de ces courses de Pyrates sur la Mer Caspie : il s’informa adroitement, qui gouvernoit l’esprit de Thomiris, afin de decouvrir ses sentimens ; & de pressentir si elle voudroit entendre au Mariage de Ciaxare. Il sçeut donc qu’un homme appelle Terez, avoit assez de credit aupres d’elle, c’est pourquoy il songea à se l’aquerir autant qu’il pût. Mais comme il faut du temps pour cela, il faloit malgré qu’il en eust, qu’il se donnast patience : pendant quoy, il voyoit la Reine tous les jours, & presque à toutes les heures. Elle luy parla de toutes les manieres differentes de faire la guerre : elle s’enquit de la façon dont Ciaxare gouvernoit ses Peuples : elle voulut sçavoir de quelle sorte on vivoit à sa Cour pendant la paix : & sur toutes ces choses, elle trouva tant d’esprit, tant de sagesse, & tant d’agrément en la conversation d’Artamene, qu’elle ne pouvoit assez le louer. Aussi