Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/233

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grande agitation dans l’esprit de Thomiris : & virent aussi quelques marques de chagrin sur le visage d’Artamene : qu’ils creurent estre causé par le despit d’estre interrompu en un entretien qu’ils pensoient luy estre tres agreable : mais qui en effet luy estoit plustost tres fascheux. Ces Princes jaloux parlerent peu : Artamene de son costé ne dit pas grand chose : & Thomiris se trouva tellement inquiette ; que ne pouvant souffrir la presence de deux Princes qui l’aymoient, & quelle ne pouvoit aimer ; & l’agreable & pourtant cruelle veüe d’Artamene, qu’elle aimoit, & qui ne l’aimoit pas ; elle les congedia tous : & bannit en mesme temps, l’objet de son indifference, & celuy de son amour. Artamcne sortit donc de chez la Reine avec ces deux Princes : & comme Indathirse luy plaisoit beaucoup, & qu’il ne soubçonnoit rien des sentimens qu’ils avoient pour luy, il ne les quitta pas si tost. Eux de leur costé qui ne cherchoient qu’à descouvrit ses intentions, estant aussi bien aises de faire durer cette conversation, luy proposerent de s’aller promener ensemble. Pendant cette promenade, ils luy firent cent questions malicieuses, sur le temps qu’il devoit encore estre en cette Cour, où il respondoit fort innocemment : de sorte que tantost il fortifioit leurs soubçons ; tantost il les affoiblissoit : mais pour l’ordinaire, il les augmentoit bien plus, qu’il ne les faisoit diminuer. Il faut sans doute, luy disoit Indathirse, que ce soit quelque affaire de grande importance, qui vous retienne si long têps icy : & qui ait obligé le Roy de Capadoce d’envoyer un homme de vostre reputation vers la Reine. Mon Maistre qui croyoit leur faire plaisir de parler avantageusement de Thomiris, respondit à Indathirse, d’une maniere