Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/258

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montant sur un cheval que son Escuyer luy presenta, s’aprocha de luy, pour luy demander s’il estoit du Païs, et’il ne pourroit point luy enseigner quelque chemin qui traversast la Forest, pour n’estre pas obligé de prendre la Plaine ? Non Seigneur, luy respondit Ortalque, mais peut-estre que ceux qui me suivent, dit il en nous montrant à cét Inconnu, vous en pourront dire quelque chose. Et alors se retournant, afin de rendre cét office à cét Estranger, Artamene qui s’estoit desja aproché, luy demanda ce que ce Chevalier luy disoit ? Mais pendant qu’il luy en rendoit conte, mon Maistre vit venir douze hommes à cheval, qui apres avoir regardé cét Estranger mirent tous l’espée à la main, & s’escrierent en se regardant l’un l’autre, c’est luy mes Compagnons, c’est luy ; il faut en diligence en envoyer advertir nostre Capitaine. Et en effet, un d’eux poussa son cheval à toute bride, vers le lieu d’où ils venoient. Pendant quoy les onze qui restoient attaquerent ce Chevalier inconnu : qui s’estant reculé de quelques pas à l’abord, commanda tout haut à son Escuyer d’aller faire tout partir en diligence : car (luy dit il, parlant d’Artamene & de nous autres, qui avions mis l’espée à la main pour le deffendre, au mesme instant que ces gens là ; voyant l’inegalité du combat) ce secours que les Dieux m’ont envoyé, suffit pour faire ferme durant quelque temps : en suite dequoy je me dégageray facilement, & seray bien-tost à vous. En effet cét Inconnu ne se trompa pas : & la generosité d’Artamene en epouvant souffrir de voir en sa presence un homme seul attaqué par onze, n avoit point balance du tout, sur ce qu’il avoit à faire : & des le premier moment qu’il avoit veû ces Chevaliers se mettre en estat d’en attaquer un ; il avoit