Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/26

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de leur santé. Celle de Philidaspe fut long temps assez mauvaise, & mesme sa vie assez douteuse : pour mon Maistre, ses blessures furent tousjours en assez bon estat : & trois sepmaines apres s’estre batu, il fut remercier le Roy, de la grace qu’il luy avoit accordée : & la Princesse de l’honneur qu’elle luy avoit fait, de la demander pour luy. elle estoit alors dans son Cabinet, où il n’y avoit que ses Femmes : si bien que comme il voulut la remercier, & exagerer la reconnoissance qu’il en avoit ; ne pensez pas, luy dit elle, qu’encore que j’aye demandé grace pour vous, je vous l’aye accordée en mon particulier : Non Artamene, luy dit elle d’un ton de voix assez imperieux, il n’y a encore que le Roy qui vous a pardonné ; & Mandane n’est pas satisfaite. S’il ne faut que mourir à ses pieds, luy respondit Artamene, je suis tout prest de le faire : Mais Madame, quel est le crime que j’ay commis ? & comment est-il possible qu’un homme qui vous respecte, autant qu’il respecte les Dieux qu’il adore, puisse vous avoir offensée ? dites moy donc, luy dit-elle, si ce n’est pas avoir failly, que d’avoir mesprisé la priere que je vous avois faite, de vivre bien avec Philidaspe ? Mais Madame, adjousta-t’il vous aviez aussi prié Philipe, de vivre bien avec Artamene. Il est vray, respondit-elle & je ne pretends pas le justifier en vous accusant : je veux seulement sçavoir, si vous estes le plus coupable, ou si vous estes le moins criminel. Je ne le sçay pas moy-mesme, (reprit Artamene en changeant de couleur) & le sujet de nostre querelle est mesme si douteux dans nostre esprit, que nous ne nous le sommes pas expliqué l’un à l’autre ; & peut-estre ne nous l’expliquerons nous jamais. vous estes vous connus ailleurs