Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/271

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en la puiſſance de Philidaſpe ! Mais Ciel, n’eſtoit-ce pas aſſez, reprenoit il, que vous y fuſſiez par ſa violence, ſans que j’y contribuaſſe ? Et faloit il que ce fuſt de ma main & par ma valeur, que l’injuſte Philidaſpe vous enlevaſt ? Mais ne penſe pas Philidaſpe, adjouſtoit il, joüir en repos d’une ſi illuſtre conqueſte : en quelque lieu de la Terre que tu te retires, il faut que l’office que je t’ay rendu ce coûte la vie. Oüy, quand tu ſerois dans Babilone, la plus grande & la plus forte Ville du monde, au milieu de tes Gardes, & juſques ſur le Throſne de tes Peres, j’iray te punir de ſon crime. Il faut que ton ſang l’efface de ma memoire : & que ta more ſoit le chaſtiment de ta faute. O Dieux, pourſuivoit il, à quels bizarres malheurs ſuis-je deſtiné ? Ha Thomiris, adjouſtoit il encore, que voſtre injuſte paſſion me couſtera cher ! Et que je ſuis rigoureuſement puny, d’avoir troublé voſtre repos ! Mais vous divine Princeſſe, reprenoit il, que l’on m’a aſſuré avoir prononcé mon Nom, lors que l’on vous a enlevée, vous en ſouviendrez vous en Aſſirie ? Ne vous laiſſerez vous point toucher par les larmes de Philidaſpe ? Ne luy pardonnerez vous point ſon crime ? La magnificence de Babilone, n’eſbloüira t’elle point vos yeux ? Cette grande Cour ne charmera-t’elle point voſtre eſprit ? N’apellerez vous point la violence de Philidaſpe un excés d’amour ? Et ſerez vous aux bords de l’Euphrate, ce que vous eſtiez aux bords de l’Iris & du Thermodon ? Enfin, divine Princeſſe, Artamene ſera-t’il touſjours preferé à Philidaſpe, & Cyrus au Roy d’Aſſirie ? Helas ! diſoit il encore, pourquoy fuſt-ce que les Dieux m’advertirent dés le premier moment que je connus Philidaſpe que je ne le devois pas aimer, pour