Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/291

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furent rangez en bataille, Artamene au lieu de leur faire un long diſcours pour les encourager, ne leur dit autre choſe ſinon,

Qui fera-ce ma Compagnons, qui me devancera ? Qui d’entre vous me previendra à tuer le premier de nos Ennemis ? Et qui ſera ce enfin, qui ſurpassera Artamene ? Allons mes Compagnons, leur dit il, car je vous profite que je n’auray pas moins de joye de voir que vous me ſurmontiez en valeur, que j’en auray à vaincre les Aſſriens.

Ce peu de paroles prononcées par un homme comme Artamene, firent un ſi grand effet dans le cœur des Soldats, qu’ils firent retentir l’air de voix éclatantes : dont le ſon reſſembloit aſſez à un Chant de Victoire & de Triomphe : Ce jour là Ciaxare par le conſeil d’Artamene, voulut que le mot de la Bataille fuſt, Jupiter Protecteur : de ſorte que le Combat commençant, il ſe fit un ſi grand bruit de part & d’autre, par la confuſion des cris, par le fracas des armes & des traits, & par le hanniſſement des chevaux, qu’il n’eſt preſque rien de plus eſtonnant. Mais Seigneurs, vous le sçavez tous, à la reſerve de Thraſibule : c’eſt pourquoy je vous diray donc ſeulement, ſans vous particulariſer cette grande journée : qu’Artamene ayant cherché le Roy d’Aſſirie avec beaucoup de foin, le trouva enfin : s’eſtant fait dire par un Priſonnier en quel endroit il devoit combattre. Le rencontrant donc dans la meſlée, Voyons, luy dit il, voyons, ſi le Roy d’Affiné eſt plus vaillant que Philidaſpe : & s’il me fera auſſi aiſé de luy oſter la vie, qu’il me le fut de la luy conſerver dans la Foreſt où je le trouvay. Ce Prince entendant ce diſcours, ſe