Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/334

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promener ſur le Port de Sinope, Artucas les vint joindre, & les prier de vouloir aller chez luy, où il ſeroit bien aiſe de les pouvoir entretenir en liberté. Eux qui connoiſſoient l’affection d’Artucas pour Artamene ; & qui ſe ſouvenoient qu’il avoit abandonné Aribée, pour eſtre fidelle à ſon Prince, eurent cette complaifance pour luy ; & le fu iuirent où il les voulut mener. Sa Maiſon eſtoit aſſez éloignée du Port ; & c’eſtoit la raiſon pour laquelle elle avoit eſté des moins bruſlées ; & eſtoit demeurée en eſtat d’y pouvoir encore habiter. Comme ils y furent arrivez, Artucas les fit entrer dans une chambre, & de là dans une autre, où ils trouverent une perſonne, que d’abord ils ne reconnurent pas, car il eſtoit deſja aſſez tard, & les flambeaux n’eſtoient pas encore allumez. Ils virent bien que c’eſtoit une femme de bonne mine, & qui paroiſſoit eſtre belle : mais ils ne diſcernoient pas aſſez parfaitement tous les traits de ſon viſage pour la reconnoiſtre. Cette incertitude ne dura pourtant pas long temps : car cette perſonne ne les eut pas pluſtost veus, que quittant une Fille d’Artucas qui eſtoit avec elle, & s’avançant vers eux, elle commença de parler, & de nommer Chriſante & Feraulas, pour leur teſmoigner la joye qu’elle avoit de les revoir. De ſorte que le ſon de ſa voix fut à peine parvenu juſques à Feraulas, que s’avançant avec precipitation, juſques aupres de la perſonne qui parloir, Ha ! Marteſie, s’eſcria-t’il, eſt-ce vous qui parlez, & puis-je croire que ce que j’entens ſoit veritable ? Ouy, reſpondit elle, je ſuis Marteſie ; & la meſme que vous laiſſastes à Themiſcire, aupres de l’illuſtre Mandane. A ces mots Feraulas tout tranſporté de joye, ſalüa tout de nouveau une perſonne qui avoit