Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/443

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promettez moy que vous ne vous oppoſerez point à l’effort qu’elles ſeront pour me delivrer ; & que par conſequent vous n’expoſerez point voſtre vie, qui m’eſt infiniment chere. Vous jugez bien, dit elle, que j’euſſe pû le faire ſans vous en parler : mais vous ayant les obligations que je vous ay, je croy que les Dieux me puniroient, ſi j’eſtois cauſe de voſtre mort. Madame, luy dit il encore plus bas qu’elle n’avoit parlé, les Dieux sçavent ſi je ſouhaiterois que vous fuſſiez contente : Mais Madame, je ne vous ay promis que d’empeſcher le Roy d’entre prendre rien contre le reſpect qu’il vous doit : & je vous l’ay promis ſans ſcrupule, parce que c’eſt le ſervir luy meſme, que de l’empeſcher, de faire un crime. Et de ce coſté là, Madame, je vous promets encore une fois, que tant que je ſeray vivant, vous ne ſouffrirez nulle violence de luy. Mais, Madame, pourrois-je avec honneur le trahir de cette ſorte ; le faire tuer ; & vous remettre entre les mains de ton Ennemy ? Toutefois, Madame, ſi vous le voulez vous le pouvez faire ; mais je vous proteſte devant les Dieux qui m’eſcoutent, que quand j’eſchaperois à la fureur des voſtres, je me paſſerois mon eſpée au travers du cœur : afin de ne me reprocher pas à moy meſme une action que ſans doute vous n’avez pas conſiderée, avant que de m’en ſoliciter. De plus, Madame, peut-eſtre comme il eſt nuit, qu’en me voulant, fraper l’on vous fraperoit ; & que voulant recouvrer la liberté, vous trouveriez la mort. Au nom des Dieux, Madame, ne vous expoſez pas à un danger, dont je ne pourrois peuteſtre vous garantir. La Princeſſe eſtoit ſi troublée, & Mazare luy parloit d’une maniere ſi touchante, qu’elle ne sçavoit a quoy ſe reſoudre : Tantoſt elle eſtoit reſoluë de crier : tantoſt