Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/46

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me dit-il, le visage tout changé) il s’agit de me rendre un service d’importance : & de me le rendre, avec beaucoup d’exactitude. Seigneur, luy dis-je, je m’estimerois bien heureux, si j’avois trouvé ce qu’il y a si long temps que je cherche : je veux dire un moyen de vous faire connoistre parfaitement, le zele que j’ay pour vostre service. Vous, le pouvez sans doute, me repliqua t’il ; mais je crains que le courage de Feraulas ne me resiste : & ne puisse pas sans peine se resoudre à ne combattre point, en l’occasion qui va s’en presenter. j’avoüe, Seigneur, luy dis-je, qu’il ne m’est pas aisé de concevoir, ce que vous me voulez ordonner : & qu’il me seroit assez difficile de ne partager pas un peril, où je vous verrois exposé. Il le faut pourtant, me dit-il, & soit que vous me consideriez comme vostre Maistre, comme vostre Prince, ou comme vostre Amy ; il faut que vous ne me resistiez point davantage. Vous sçavez (me dit-il, avec une bonté extréme) que je connois le cœur de Feraulas : & que je n’ay pas besoin d’en avoir de nouvelles prevues, pour me le faite estimer. C’est pourquoy ne vous inquiétez pas pour cela : & croyez que vous ne m’avez jamais plus obligé, que vous m’obligerez aujourd’huy. Enfin, adjousta-t’il encore, quoy que je puisse vous commander de faire ce qui me plaist, je ne laisse pas de vous dire en cette rencontre, que je vous en prie. A ces mots, ne pouvant souffrir qu’il continuast davantage ; Seigneur, luy dis-je, vous me donnez de la confusion : c’est pourquoy ne differez pas plus long temps à me dire ce que vous voulez que je face, afin que je me haste de vous obeïr. Il faut, me dit-il, mon cher Feraulas, que vous ne combattiez point du tout, que je ne vous