Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/497

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qu’elle s’en retournaſt chez ſon Parent, où en effet elle s’en alla : & où elle fut viſitée de toutes les Dames de la Ville ; & de tout ce qu’il y avoit de Princes, & de perſonnes de qualité à Sinope. Cependant tous les Amis d’Artamene parloient continuellement au Roy en ſa faveur : & le Roy teſmoignoit effectivement deſirer de pouvoir rompre ſes chaiſnes : mais en meſme temps il paroiſſoit eſtre opiniaſtrément reſolu, à vouloir sçavoir preciſément, l’innocence ou le crime d’Artamene. Il y avoit auſſi dans ſon cœur un ſentiment confus, qui faiſoit qu’il ne sçavoit pas luy meſme ce qu’il vouloit : car enfin ſi par le retour de Megabiſe qu’il avoit envoyé en Armenie, il aprenoit qu’on luy rendiſt ſa Fille, il ſentoit bien qu’il auroit moins d’indulgence pour Artamene : mais ſi au contraire on la luy refuſoit, & qu’il faluſt recommencer une nouvelle guerre ; il connoiſſoit bien auſſi, que la liberté d’Artamene, ſeroit neceſſaire pour celle de Mandane. Ainſi demeurant toujours irreſolu, les Rois de Phrigie & d’Hircanie, & tous ces Princes qui luy parloient peut Artamene : ne pouvoient tirer de Ciaxare, une parole deciſive.

Comme ils eſtoient un jour à l’entour de luy, on vint luy dire qu’il paroiſſoit des Troupes Eſtrangeres dans la Plaine, qui s’aprochoient de Sinope : & un moment apres, Thimocrate & Philocles entrerent ; & dirent au Roy que le Prince Philoxipe, Favory du Roy de Chipre leur Maiſtre & ancien Amy d’Artamene : ayant marié la Princeſſe Agariſte ſa Sœur, au Prince de Cilicie ; l’avoit obligé en l’eſpousant, d’envoyer dix mille hommes à Artamene, afin qu’il les preſentast à ſa Majeſté : & qu’il leur fiſt la grace de ſouffrir qu’ils euſſent quelque part à la gloire que toutes ſes Troupes aquerroient, ſous la conduite d’un ſi