Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/57

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redoutables, qu’ils ne nous le doivent estre : estant bien plus difficile combattre des Soldats qui viennent de vaincre ; que d’autres qui n’auroient pas combatu. Le brait de nostre Victoire, devancera nostre Armée, & affaiblira le cœur de nos Ennemis : la crainte & la douleur les auront à demy deffaus, quand nous arriverons à eux : & si les conjectures ne me trompent, cette seconde Victoire ne nous coustera pas trop cher. Le Vaillant Philidaspe qui vient d’arriver, nous la rendra encore plus facile : & La Fortune qui aime à favoriser les entreprises dangereuses & extraordinaires ; ne nous abandonnera pas en celle-cy. Allons donc mes Compagnons, allons : car si vous aimez le travail, vous n’en pouvez jamais trouver de plus glorieux : & si vous cherchez, le repos, vous ne pouvez aussi jamais establir plus fondement le vostre, qu’en mettant vos Ennemis en estat de ne le pouvoir plus troubler. Artamene ayant parlé à peu prés de cette sorte, tous les Officiers & tous les Soldats aplaudirent à la resolution qu’il sembloit avoir prise : en suite dequoy, il fit la reveüe de ses Troupes, pour voir combien il en avoit perdu, & trouva qu’il ne luy manquoit que cinq cens hommes, quoy qu’il en eust deffait quinze mille. Apres cela, il commanda que chacun fist un leger repas, & se preparast à combattre dans deux heures. Cependant il traitta tousjours fort civilement avec Philidaspe : Mais comme il vouloit que le bruit de sa premiere Victoire devançast ses Troupes, & commençast de luy embaucher la seconde ; il renvoya au Roy de Phrigie, Imbas General de l’Armée qu’il avoit