Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/583

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’imaginer du changement du Roy, creut que peut-eſtre n’avoit il pas trouvé bon qu’elle n’euſt point encore eſte voir Philoxipe qu’il aimoit ſi cherement : & que preſque toutes les femmes de la Cour avoient eſté viſiter. Car durant ſa maladie, la belle Princeſſe de Salamis, & la Princeſſe Agariſte ſes Sœurs, ne l’avoient point abandonné, & ainſi les Dames y pouvoient aller avec bien-ſeance. Neantmoins il ſe trouva que le jour qu’Aretaphile y fut, comme Philoxipe eſtoit beaucoup mieux, elles eſtoient ſorties : De ſorte que la Princeſſe Aretaphile y allant ſuivie de quatre ou cinq de ſes femmes le trouva ſeul. Bien eſt il vray qu’elle n’y fut pas long temps ſans Compagnie : car le Roy arriva un moment apres. Comme Philoxipe le vit entrer, il rougit, & parut auſſi interdit de cette rencontre, que ſi effectivement il euſt eſté amoureux d’Aretaphile. Le Roy qui remarqua ce changement de couleur, eſtant puiſſamment touché de voir Philoxipe en danger pour l’amour de luy, faiſant un grand effort ſur luy meſme, s’aprocha de la Princeſſe Aretaphile ; qui par reſpect luy avoit voulu quitter ſa place, & où il voulut pourtant qu’elle demeuraſt. Et apres l’avoir regardée quelque temps ſans parler. Madame, luy dit il en ſoupirant, ne voulez vous point guerir Philoxipe ? Seigneur, luy repliqua t’elle, ſi ſa ſanté dependoit de moy, voſtre Majeſté ſeroit bien toſt conſolée de la douleur que ſa maladie luy cauſe. Philoxipe qui vit une grande alteration ſur le viſage du Roy, eut peur qu’il ne diſt encore quelque choſe qui fiſt connoiſtre à Aretaphile l’opinion qu’il avoit de luy : c’eſt pourquoy prenant la parole, ſans donner loiſir à ce Prince de reſpondre ; Seigneur, luy dit il, quoy que je croye que la Princeſſe Aretaphile ſoit