Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/629

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fait baſtir ; pourquoy elle eſtoit en celle là ; en quel lieu eſtoit Cleanthe ; pourquoy ils n’avoient pas laiſſé ordre de l’advertir du lieu de leur retraite ; & comment ce dernier malheur eſtoit arrivé à Policrite ? Mais, luy dit il, ma Sœur, parlez ſans déguiſer la verité : car le Prince Philoxipe sçait que je ſuis voſtre Frere, que Policrite eſt ma Fille ; & je sçay auſſi qu’il luy fait l’honneur de l’aimer ; c’eſt pourquoy ne déguiſez plus rien devant luy ; car il a preſentement plus de part en Policrite que je n’y en ay, puis que je la luy ay donnée : & qu’il vient d’y aquerir encore un nouveau droit en luy ſauvant la vie. je vous laiſſe à penſer, Seigneur, quelle fut la ſurprise de Policrite, d’aprendre qu’elle eſtoit Fille de Solon, qu’elle connoiſſoit bien pour un Grand & excellent homme, mais qu’elle ne connoiſſoit pas pour ſon Pere : & d’entendre en meſme temps, qu’elle eſtoit donnée à Philoxipe. Elle en rougit donc avec beaucoup de modeſtie ; & regardant Megiſto, comme pour luy demander s’il eſtoit vray qu’elle fuſt Fille de Solon ? elle la confirma en cette croyance : & luy donna lieu de confondre ſi bien la joye qu’elle avoit de revoir Philoxipe ; avec celle qu’elle avoit auſſi de voir qu’elle eſtoit Fille d’un Homme ſi illuſtre ; qu’il n’en parut dans ſes yeux que ce que luy en devoit cauſer un ſi grand honneur. Philoxipe prenant alors la parole, dit des choſes à Solon auſſi obligeantes pour Policrite que pour luy : & Megiſto fut quelque temps ſans pouvoir contenter la curioſité de ſon Frere. Mais enfin elle luy aprit, comment connoiſſant l’amour que le Prince Philoxipe avoit pour Policrite ; elle avoit creû à propos de dire ſeulement à cette Fille qu’elle eſtoit plus que ce qu’elle penſoit eſtre : afin qu’elle connuſt qu’elle eſtoit