Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/155

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des Perſonnes ſi intelligentes, & ſi bien inſtruites de tout ce qu’il y a au monde digne d’eſtre sçeu, que ce ſeroit faire une choſe abſolument inutile, que de les entretenir de la beauté de la magnificence, & de la ſplendeur de Corinthe. Il n’y a donc perſonne icy qui n’aye ſans doute ouï parler de cet Iſthme celebre ſi connu par toute la Mer Egée : de ce ſuperbe Chaſteau qui commande cette belle Ville, & qui la deffend : de ce Port ſi grand & ſi bon qui l’embellit infiniment : de ce grand commerce qui la rend ſi peuplée ; qui cauſe ſa richeſſe ; qui y met l’abondance & les plaiſirs ; & qui ne sçache en effet que tout ce qui peut rendre une Ville agreable, ſe trouve ſans doute en celle là. Le Prince qui la gouverne, eſt un homme de grand eſprit : la Reine ſa femme qui s’appelle Meliſſe, eſt encore une tres belle Princeſſe, quoy qu’elle ait un fille qui eſt ſans contredit des plus belles & des plus accomplies Perſonnes du monde. Voila donc l’eſtat où eſtoit la Maiſon Royale lors que j’arrivay à Corinthe : ce n’eſt pas que Periandre n’euſt un fils : mais il demeuroit à Epidaure, aupres de ſon Ayeul maternel qui en eſtoit Prince : ainſi tout le divertiſſement de la Cour eſtoit attaché à Meliſſe, & à la Princeſſe Cleobuline ſa fille. Et certes je ſuis obligé de dire, que ſi je fuſſe né avec beaucoup de diſposition au bien, j’eſtois en lieu pour profiter extrémement. Car la Cour de Periandre eſtoit touſjours remplie des plus Grands hommes de toute la Grece : & il aime tellement à faire honneur aux Eſtrangers, que ſon Palais eſtoit touſjours plein de gens de Nations differentes. Mais comme je n’eſtois pas alors en un âge qui me permiſt de chercher la converſation des Sages & des Sçavants ; je m’arreſtay bien