Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/35

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monter & pour gagner le haut, malgré la reſistance des autres. Quelques uns tomboient, & faiſoient tobmer ceux qui les ſuivoient : quelques autres plus fermes & plus heureux, renverſoient leurs ennemis ; s’acrochoient aux Creneaux, & demeuroient apres en eſtat de combattre ſur la Muraille, pour faciliter l’entrée de la Ville à leurs compagnons par cét endroit. Que ſi la valeur de ceux qui eſcaladoient les Murs eſtoit grande, celle de ceux qui portoient les Beliers aux Portes ne l’eſtoit pas moins. Le nom d’Artamene eſtoit le ſignal qui regloit le furieux mouvement de ces terribles Machines ; que mille bras animez par des cœurs qui deſiroient ſauver Cyrus, pouſſoient avec une violence extréme : ce qui n’empeſchoit pas toutefois, que le mouvement n’en fuſt auſſi égal & auſſi reglé, que ſi un ſeul bras les euſt fait agir : tant il eſt vray que lors que des Soldats ſervent par inclination ils ſervent bien. Cette force unie & ramaſſée de tant de perſonnes zelées pour le ſalut de Cyrus, donnoit de ſi grands coups, que non ſeulement les Portes, mais toutes les Murailles en eſtoient ébranlées : & le ſon retentiſſant de ces Beliers, dont la teſte eſtoit de ce Cuivre fin, que l’on appelloit or de Corinthe ; avoit quelque choſe de ſi terrible, que le bruit du Tonnerre ne l’eſt gueres davantage. Plus de cent de ces Machines de guerre, que l’Antiquité apelloit des Baliſtes & des Catapultes, jettoient inceſſamment ſur les Murailles & dans la Ville, une greſle de dards & de pierres : en vain l’on tiroit ſur les Soldats qui montoient aux eſchelles, & ſur ceux qui pouſſoient les Beliers : puis qu’il n’y en avoit pas pluſtost un de mort, qu’il y avoit preſſe à prendre ſa place. Le dedans de la Ville n’eſtoit pas