Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/550

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fait le ſoir : ils le laiſſerent dans la liberté de faire compliment à Cyrus, des ſoins qu’il avoit de luy. Seigneur, luy dit il, ſi vous traittez vos Ennemis de cette ſorte, comment agiſſez vous avec vos Amis ? Vous le sçaurez par voſtre propre experience, luy dit il, ſi vous le voulez : car vous n’avez qu’à me dire ſincerement où eſt la Princeſſe Mandane, pour m’obliger à n’eſtre plus voſtre ennemy. Je voudrois, luy dit ce Prince, pouvoir ſatisfaire voſtre curioſité, je le ferois avec une extréme joye : mais je vous proteſte par tous les Dieux que nous adorons, que je n’en sçay rien du tout. Et pour vous monſtrer que je ſuis ſincere, je ne vous dis pas avec la meſme fermeté, que le Roy mon Pere ne le sçait point : parce que comme c’eſt un Prince qui ne donne connoiſſance à perſonne des affaires de ſon Eſtat, il pourroit eſtre qu’il le sçauroit ſans que je le sçeuſſe. Mais Seigneur, ſi vous pouvez eſtre capable de vous fier à la parole d’un Ennemy, ſouffrez que j’aille dés que je le pourray, parler au Roy mon Pere, & employer toute mon adreſſe pour deſcouvrir la verité que je viendray apres vous redire ſincerement. Genereux Prince, luy repliqua Cyrus, vous n’avez point de parole à donner ; vous eſtes libre ; & vous pourrez faire ce qu’il vous plaira : car je ſers un Roy accouſtumé à tenir les promeſſes que je fais. Ainſi quand vous voudrez retourner trouver le Roy voſtre Pere vous le pourrez : Mais s’il eſt vray que les prieres d’un Ennemy puiſſent quelque choſe ſur voſtre eſprit, je vous conjureray de vouloir obliger le Roy d’Armenie à dire ce qu’il sçait de la Princeſſe Mandane : & à ne vouloir pas forcer Ciaxare à le deſtruire malgré qu’il en ait. Vous pouvez avoir veû de deſſus vos Montagnes