Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/596

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quelque deſſein caché : & Euphranor luy meſme en ſoubçonna quelque choſe, à ce que sçeut Leoſthene, par cette Fille qui eſtoit de ſes Amies : l’aſſurant de plus, qu’auſſi toſt qu’il ſeroit revenu d’un petit voyage de huit jours qu’il devoit faire dans deux ou trois, il me forceroit à m’expliquer.

Toutes choſes voulant donc que je partiſſe, & mon Vaiſſeau eſtant preſt quand Euphranor vint à partir, je pris congé de luy ; l’aſſurant qu’il ne me trouveroit plus à ſon retour : & le conjurant de croire, que ſi je ne mourois pas à une occaſion où j’allois, j’aurois l’honneur de le revoir, & de me faire un peu mieux connoiſtre à luy. Apres ſon deſpart, je ſus encore quatre jours à Gnide : pendant leſquels Alcionide qui n’avoit jamais entré dans aucun Vaiſſeau de guerre, non plus que trois ou quatre de ſes Amies, teſmoigna avoir une ſi forte envie de voir le mien, que je la ſuppliay de la vouloir ſatisfaire : & d’y venir paſſer la derniere apres-diſnée que je devois eſtre à ce Port. M’ayant donc accordé, avec la permiſſion de Phedime, ce que je luy demandois, je me preparay à la recevoir en ce lieu là, avec toute la magnificence poſſible : mais pourtant avec toute la melancolie dont un cœur puiſſe eſtre capable. En effet, quand je venois à penſer, que dans quatre jours je ne verrois plus Alcionide : la douleur m’accabloit de telle ſorte, que je n’eſtois gueres capable de tous les petits ſoins neceſſaires pour bien ordonner une belle Feſte. Auſſi fut-ce ſur la diligence de Leoſthene que je m’en repoſay, qui s’en acquita ſans doute admirablement. Car encore que le temps fuſt extrémement court à s’y preparer, neantmoins mon Vaiſſeau ne laiſſa pas d’eſtre orné de cent Banderoles