On peut remarquer ici une illusion d’autant plus à craindre, qu’il est mal aisé de la découvrir. Plusieurs de ceux qui s’abandonnent à la vie spirituelle, s’aimant trop eux-mêmes, si toutes fois l’on peut dire qu’ils s’aiment eux-mêmes, choisissent les exercices qui leur plaisent davantage, & laissent les autres qui ne sont pas à leur goût, qui choquent leur inclination naturelle, qui servent à mortifier leurs passions brutales, contre lesquelles ils devroient tourner toutes leurs forces dans le Combat spirituel. On ne sçauroit trop les exhorter d’aimer la peine qu’il y a à les vaincre ; parce que tout dépend de-là ; & que plus ils feront paroître de courage à surmonter les premieres difficultés qui se rencontrent dans la vertu, plus leur victoire sera prompte & assurée. Que s’ils se proposent uniquement les travaux de cette guerre, s’ils s’y attachent tout-à-fait, & s’ils n’aspirent pas trop-tôt à la victoire qui sont les vertus, ils obtiendront plus facilement & plus surement ce qu’ils prétendent.