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Page:Segard - Hymnes profanes, 1894.djvu/83

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Je ne puis me soustraire à la mélancolie
De ce chant qui se perd comme la poésie
Dans le profond repos de toute la nature,
À peine si la source ose de son murmure
Accompagner la voix, et le bruissement
Des feuilles agitées aide au recueillement.

Alors devant mes yeux à demi-clos une ombre
Apparaît virginale en son vêtement sombre,
Pâle elle me sourit et je crois voir encore
Dans son regard éteint le blond reflet d’aurore
Qui me noyait le cœur lorsque j’avais vingt ans
Et que j’allais chantant les fleurs et le printemps !

Hélas, dans un linceul elle est là qui repose,
Elle a voulu qu’on mît dans sa tombe une rose
Qui fût un souvenir de son amour brisé,
Et c’est moi qui l’ai mise avec un long baiser :
Mais quand on eût cloué le lugubre cercueil,
Mon cœur a pour toujours pris l’immuable deuil !