Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lucas.

Heureux ! C’est donc pour ça qu’il crie toujours ; qu’il est après ses ouvriers comme un dogue après les bestiaux ; qu’il court sans arrêter, comme le Juif-Errant ; qu’il ne se donne de repos ni fêtes ni dimanches.

Gaspard.

Je ne dis pas, mais il a tout de même des millions, et la croix d’honneur, et des châteaux, et des terres à ne savoir qu’en faire ; et tout le monde le salue et le craint.

Lucas.

Oui, on le craint, comme tu dis, mais on ne l’aime pas ; on le salue et on rit de lui ; et toi, tout le premier, tu l’appelles vieux parchemin, vieil avare, sac à argent, et je ne sais quoi encore.

Gaspard.

Parce qu’il n’est pas bon, et qu’il ne donne pas aux pauvres, et qu’il est dur pour les ouvriers ; mais je ne ferai pas comme lui, tu verras ça.

Lucas, riant.

Je ne verrai rien du tout, parce que tu resteras ce que tu es ; ouvrier, aidant mon père à faire aller la ferme.

Gaspard.

Non, je ne veux pas travailler à la terre ; je te l’ai déjà dit, je n’y travaillerai pas.

Une voix.

Eh ! vous autres, arrivez donc ! On a besoin de vous pour ramasser le trèfle ? »