Aller au contenu

Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/383

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bénira et te récompensera. Gaspard, que je t’aime ! ajouta-t-elle en se jetant dans ses bras. Que de pauvres ne souffriront plus, grâce à toi, à ta charité ! Je vais vite le dire à ma bonne.

Mina partit en courant. Gaspard resta pensif.

« C’est un ange que Dieu m’a donné ! elle sera mon bon ange ; elle me donnera ce qui m’a manqué jusqu’ici : la charité. À mesure que je l’aime, je me sens meilleur, mieux disposé pour faire le bien, plus indulgent, plus doux. Mon Dieu, que j’ai de reproches à me faire ! que d’actions mauvaises dans ma vie ! quelle ambition ! Quel égoïsme ! Ma première amélioration date de ma tendresse pour mon père adoptif. Je me suis senti tout autre quand j’ai aimé. Et à présent, je sens mon cœur s’élargir, se remplir de bons sentiments ; je comprends le chagrin, les peines du cœur : je comprends même la piété, la prière, depuis que j’ai mené Mina à la messe ; je l’y mènerai souvent ; la prière fait du bien ; elle laisse quelque chose de doux, de satisfait, que je ne connaissais pas. »

Et, en finissant ces mots, Gaspard pria Dieu dans son cœur de lui pardonner son indifférence passée et de le rendre meilleur à l’avenir. Il jeta les yeux autour de la chambre et ne vit ni crucifix ni Sainte Vierge ; pourtant il aperçut dans un coin de la chambre un coussin placé comme pour s’y agenouiller, devant une petite table. Sur cette table