Page:Segur - Les Deux Nigauds.djvu/328

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mes humeurs, mes tristesses hypocrites, mes résistances à vos ordres et à vos sages conseils, à vous séparer de moi en m’envoyant dans cette pension dont je voulais si sottement et si méchamment porter l’uniforme. J’ai entraîné Simplicie à faire comme moi, à bouder, à pleurer, pour vous obliger, à force d’ennui et de contrariété, à me donner une compagne de voyage. Je suis si malheureux dans cette maison, j’y suis si maltraité, que vous auriez pitié de moi si vous voyiez ma tristesse, mon repentir et toutes mes souffrances. Les maîtres sont assez bons, mais il y en a de bien durs ; les élèves sont d’une méchanceté que je n’aurais jamais soupçonnée ; une fois ils m’ont presque étouffé ; J’ai été malade trois jours ; une autre fois ils m’ont tant battu avec leurs règles, dans une révolte, qu’ils ont déchiré mes habits et qu’ils m’ont tout meurtri ; j’ai été obligé d’aller à l’infirmerie ; j’ai encore des plaques noires partout et je puis à peine m’asseoir. Je n’ai pas vu Prudence ni Simplicie depuis quinze jours ; je ne sais pas pourquoi elles ne sont pas venues me voir.

« Je vous en prie, mon cher papa, faites-moi revenir près de vous, et gardez-moi toujours ; je serai si heureux de vous revoir à Gargilier ainsi que maman, et de penser que je ne vous quitterai jamais et que je ne reviendrai plus dans ce Paris que je déteste ! J attends votre réponse avec une