Page:Segur - Lettres de la comtesse de Segur.djvu/19

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besoin impérieux, irrésistible, d’aller la voir trois ou quatre fois par jour. Or, tu ne trouveras pas à te loger en garni dans notre quartier, il faudra donc passer l’eau ; ce sera loin, ce sera cher, ce sera odieux et pour elle et pour moi, par conséquent pour toi, cher enfant, qui nous aimes.

Ta famille en sera mécontente et harassée ; la mienne en sera désolée et éreintée.

Tu vois donc avec quel empressement tu dois accueillir le moyen de salut que je vais t’offrir, moyen qui comblera de joie notre petite Olga, moi autant qu’elle, et toi par conséquent aussi puisque tu nous aimes.

Ce moyen est honorable et aimable ; il est clair que tu sacrifies ton bien-être à la satisfaction de ta femme et de sa pauvre vieille mère, qui t’en seront bien sincèrement reconnaissantes.

Je crois que tu le devines ; dans tous les cas, tu le connais en gros, mais non en détail.

Tu aurais donc… (fume un cigare pour te donner de la patience, de la résignation et du dévouement), tu aurais tout l’entresol de notre appartement ; ta chambre serait l’ancienne d’Olga qui prendrait celle de Sabine ; celle entre deux serait un cabinet de toilette et de décharge ; ton petit Jacques[1] serait dans la chambre au-dessous de la mienne et toute pareille ; la chambre au bout que ton beau-père te propose pour tes meubles, qui a été jadis habitée par Woldemar et qui a un escalier de dégagement, serait un fumoir pour toi. Tu ferais de tout l’appartement

  1. En espérance.