Page:Segur - Pauvre Blaise.djvu/187

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— Je te dis que c’est affreux ; je n’en veux pas. Donne-moi ce cerf-volant. »

Blaise le lui remit avec quelque inquiétude. Quand Jules le tint entre ses mains, il donna un grand coup de poing dans le papier, qu’il creva, mit le tout en lambeaux, brisa les baguettes d’osier et mit la queue en pièces. Le pauvre Blaise poussa un cri de désolation.

« Hélas ! monsieur Jules, que faites-vous ? Tout mon travail perdu ! L’ouvrage de trois heures ?

— Ne voilà-t-il pas un grand malheur ! Recommence, et tâche de faire mieux.

— Je ne peux pas ; vrai, je ne peux pas, monsieur Jules, dit le pauvre Blaise en sanglotant… j’ai fait de mon mieux… Je n’ai plus de courage… Je ne peux pas recommencer ; cela m’est tout à fait impossible.

— Paresseux ! imbécile ! Tu es ici pour m’amuser ; je veux un autre cerf-volant. »

Blaise était tombé sur une chaise ; il continuait à sangloter, la tête cachée dans ses mains ; sa patience et sa résignation étaient vaincues par la dureté et l’égoïsme de Jules ; la tristesse de son cœur, longtemps comprimée, se fit jour, et il ne put retenir ses larmes.

« Va-t’en, pleurnicheur, lui dit le méchant Jules ; va-t’en chez toi, et reviens demain de bonne heure. »