Page:Segur - Pauvre Blaise.djvu/285

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mon père, et, avec l’aide du bon Dieu, j’arriverai à la fin de ma vie sans avoir jamais vendu ni mon cœur ni ma conscience. Je puis affirmer à madame la comtesse qu’elle se trompe en pensant que j’ai intrigué pour gagner l’amitié de M. le comte et de M. Jules. Je n’ai rien fait pour cela ; c’est venu tout seul, je ne sais comment, car je sens combien je suis loin de mériter les bontés de M. le comte, de M. Jules et de Mlle  Hélène. Le bon Dieu a mené tout cela. Peut-être m’a-t-il donné tant d’amour pour eux afin de m’éprouver, et me donner le mérite du sacrifice au moment de ma première communion… Mais, je vous le promets, madame la comtesse, je ne verrai vos enfants qu’avec votre permission. »

En achevant ces mots, le pauvre Blaise, qui avait réussi jusque-là à conserver son sang-froid, fondit en larmes. Il voulut dire quelques mots d’excuse, mais les paroles ne pouvaient sortir de ses lèvres ; honteux de prolonger une scène dont la comtesse pouvait s’irriter, Blaise prit le parti de s’en aller sans autre explication, et, saluant à la hâte, il s’avança vers la porte. Avant de l’ouvrir il jeta un dernier regard sur la comtesse, qui s’était levée et qui avait fait un pas vers lui ; un certain attendrissement se manifestait sur le visage de la comtesse ; au mouvement que fit Blaise pour s’arrêter, elle reprit son