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LE NOTAIRE JOFRIAU

— Si, répondit-elle d’une voix pénétrée. J’y demeurerai sûrement plusieurs mois, car mes parents m’y rejoindront bientôt. D’autre part, dit-elle, hésitante, l’attitude et les avances de mon cousin me laissent prévoir que je m’y fixerai à jamais.

Surprise autant que bouleversée par cette déclaration, Marie-Josephte pensa :

— Pourquoi, puisque Monsieur Jofriau est engagé envers sa cousine m’a-t-il fait de si brûlants aveux, l’autre soir ? Il s’est donc joué de moi et diverti de ma crédulité tandis qu’il déposait son cœur et son amour aux pieds de l’opulente Mademoiselle Duval-Chesnay.

Son âme se crispa sous une étreinte douloureuse et un sanglot monta à sa gorge. Elle fut quelques instants silencieuse. Suzanne qui l’observait vit que son coup avait porté. Satisfaite du résultat obtenu elle se mit à babiller avec entrain.

Sur la route, Michel hâtait le pas ; il s’empressait à la rencontre des jeunes filles qu’il n’avait pas trouvées à son retour, se promettant de les taquiner : il avait mieux tenu parole qu’elles-mêmes qui s’étaient enfuies. Avant de les apercevoir, il entendit la voix harmonieuse et le rire sonore de sa parente.

— Toujours gaie et sémillante cette belle Suzanne, remarqua-t-il. Mais le notaire gardait en son cœur l’image de la jeune fille à la suave beauté, pour la première fois aperçue chez le curé, qu’il a revue en-