consacrées par une longue routine, de déclamer contre des crimes imaginaires, en nous félicitant de nos iniquités réelles, et de nous livrer au luxe, à l’intrigue, à la frivolité, en poussant le char de quelque triomphateur à travers les débris des générations ?
L’homme sauvage était plus près du bonheur par
cela seul que ses maux étaient momentanés comme
ses biens, comme ses prétentions et ses projets. Si
parmi nous les suites des incidens heureux ont de
la durée, les longues conséquences des incidens funestes
n’en sont pas mieux compensées. L’avantage
obtenu s’affaiblit à l’instant même, tandis que les
peines, dont trop souvent on a honte, excitant à
chercher les moyens d’en devenir et surtout d’en
paraître exempt, se prolongent durant une partie
considérable de nos jours.
Il n’en serait pas ainsi au milieu d’une civilisation moins avancée, quant à ce qui séduit seulement. Les relations étant plus simples, les penchans pourraient se succéder sans se combattre ; on oublierait même en peu d’heures des désirs impétueux, soit que la possession les éteignît, soit qu’ils fussent remplacés par le sentiment de quelque autre besoin devenu presque irrésistible. Autrefois les hommes ignorans, ceux du moins qu’épargnaient l’oppres-