Page:Senancour - Rêveries, 1833.djvu/14

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même qui paraissent en avoir opéré, tous n’ont fait qu’ébaucher leur ouvrage. Souvent la fortune leur manqua, et quelquefois peut-être ils manquèrent à leur fortune. Ni les héros, ni les sages n’ont vaincu leur destinée. Interrogez les ombres les plus illustres, leurs souvenirs ne seront qu’une longue plainte. Pardonnez donc à celui qui vit sans éclat, de subir aussi la loi commune, et d’indiquer faiblement ce qu’il eût voulu mieux établir dans ses écrits. Il aurait plus de lecteurs, s’il les occupait de leurs intérêts accidentels ; mais ces fantaisies passent, et les vraies convenances subsistent.

Vous, du moins, qui, durant la course laborieuse que nous avons tous entreprise, vous arrêtez quelquefois à l’écart, vous qui désirez pressentir la réalité, malgré le silence apparent de la nature, venez : notre groupe ne sera pas nombreux. Nous laisserons à des esprits, doués d’infaillibilité, le soin de dire hautement ce qu’il faudrait