Page:Senancour - Rêveries sur la nature primitive de l’homme, 1802.djvu/232

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ne sent ni ne pense ? S’il n’existoit point avant la formation du corps, je demanderois comment a pu commencer cet être simple ? et, s’il a pu commencer, pourquoi il ne sauroit finir ? si l’idée de son indestructibilité n’entraîne pas l’impossibilité de sa formation autant que celle de son anéantissement ; et par quelle raison cet être, qui est et sera nécessaire, n’étoit pas nécessaire antérieurement ? dans quelle fin cet être qui a commencé pour animer un corps, et n’étoit pas quand il n’en animoit pas, durera quand il n’aura plus de corps à animer ? et comment il sera semblable à lui-même dans un état si différent de celui pour lequel il fut d’abord ordonné ?

Si je voulois changer en système le doute que j’expose, je crois que je dirois facilement dans ce sens quelque chose de vraisemblable sur le problème insoluble de la liberté de l’homme ; car, si le principe actif a un mouvement propre, voilà la liberté ; mais si ce mouvement lui-même est modifié par les réactions de la matière indifférente, voilà la pensée même déterminée par les sensations, et dans des rapports nécessaires avec les impressions des objets extérieurs et les dispositions des organes. Si le principe actif ne peut animer le