sible. Cède, pour n’être pas contraint ; et sans apposer un effort puéril à la force universelle que rien n’arrête, sans lutter contre le fleuve éternel, repose heureusement sur le nacelle qu’une douce pente entraîne à l’inévitable mort. Si cet abandon est paisible, jouis des fruits que présente à ta main la rive qui s’offre et fuit sans cesse ; si les orages ou les ennuis te font desirer le terme, quitte ta nacelle, il est par-tout sous toi.
Tout est indifférent dans la nature, car tout est nécessaire : tout est beau, car tout est déterminé. L’individu n’est rien, comme être isolé : sa cause, sa fin sont hors de lui. Le tout existe seul absolument, invinciblement, sans autre cause, sans autre fin que lui-même, sans autres lois que celles de sa nature, sans autre produit que sa permanence. Nulle chose n’est particulièrement selon la nature, car nulle n’est hors d’elle : tout est semblable à ses yeux ; ou plutôt elle ne choisit rien, ne veut rien, ne condamne rien ; elle se sent dans toutes ses parties, mais elle marche de sa force irrésistible sans dessein comme sauf liberté. Elle a le sentiment, mais non la science[1] d’elle-même. Elle ne peut être au-
- ↑ Toute science n’est que l’estimation des diffé-