Page:Senancour - Rêveries sur la nature primitive de l’homme, 1802.djvu/73

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riodes absolus, en nous laissant seulement sensibles aux impressions encore modérées du printemps et de l’automne, qui animent et calment alternativement notre vie, sans la fatiguer ou l’arrêter.

Dès que la nature visible est activée par les émanations de l’astre qui la féconde, et reprend à nos yeux sa force productive suspendue dans les hivers, ce mouvement nouveau imprimé à tous les êtres, facilite notre vie, et nos desirs s’embrasent au feu de l’impulsion générale : tout nous entraîne, tout promet, tout séduit ; avides d’extension, nous ne voyons sur sa trace rapide que joies, espérances, illusions heureuses pleins de confiance et de séduction, nous hâtons l’avenir pour y précipiter notre vie. C’est ainsi que nous chérissons la saison où nous sentons plus ardemment et plus heureusement, et où nous existons en quelque sorte davantage.

Doux printemps, jeunesse toujours nouvelle de l’inépuisable nature, tous les cœurs ont aimé tes premiers beaux jours, tous les poètes les ont chantés : tu soutiens et console notre vie, tu fais fleurir l’espérance sur tes traces annuelles, et vivifie nos jours flétris durant le sommeil de la nature. Tu la montres toujours