Page:Senancourt Obermann 1863.djvu/251

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sans que nous fussions obligés de le contenir dans le silence, et de le renvoyer derrière avec un demi-regard d’une certaine dignité.

Nous partîmes le 14 septembre ; il faisait un beau temps d’automne, et nous l’eûmes avec peu d’interruption pendant toute notre course. Ciel calme, soleil faible et souvent caché, matinées de brouillards, belles soirées, terre humide et chemins propres ; le temps enfin le plus favorable, et partout beaucoup de fruits. Nous étions bien portants, d’assez bonne humeur : lui, avide de voir et tout prêt à admirer ; moi, assez content de prendre de l’exercice, et surtout d’aller au hasard. Quant à l’argent, beaucoup de personnages de roman n’en ont pas besoin ; ils vont toujours leur train, ils font leurs affaires, ils vivent partout sans qu’on sache comment ils en ont, et souvent quoiqu’on voie qu’ils n’en doivent pas avoir : ce privilège est beau ; mais il se trouve des aubergistes qui ne sont pas au fait, et nous crûmes à propos d’en emporter. Ainsi il ne manqua rien, à l’un pour s’amuser beaucoup, à l’autre pour faire avec lui une tournée agréable ; et plusieurs pauvres furent justement surpris de ce que des gens qui dépensaient un peu d’or pour leur plaisir trouvaient quelques sous pour les besoins du misérable.

Suivez-nous sur un plan des environs de Paris. Imaginez un cercle dont le centre soit le beau pont de Neuilly près de Paris, vers le couchant d’été. Ce cercle est coupé deux fois par la Seine et une fois par la Marne. Laissez la portion comprise entre la Marne et la petite rivière de Bièvre : prenez seulement le grand contour qui commence à la Marne, qui coupe la Seine au-dessous de Paris, et qui finit à Antony sur la Bièvre : vous aurez à peu près la trace que nous avons suivie pour visiter, sans nous éloigner beaucoup, les sites les plus boisés, les plus jolis ou les plus passables d’une contrée qui n’est