Page:Senart - Les Castes dans l Inde les faits et le système.djvu/245

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temps, les âryens assignent au repas[1]. Produit du foyer sacré, il est le signe extérieur de la communauté de la famille, de sa continuité dans le passé et dans le présent ; de là les libations, dans l’Inde les offrandes journalières aux ancêtres. Là même où, par l’usure inévitable des institutions, le sens primitif a pu s’atténuer, il reste bien vivant dans le repas funèbre, le perideipnon des Grecs, le silicernium des Romains, qui, à l’occasion de la mort des parens, manifeste l’unité indissoluble de la lignée[2].

Que le repas ait gardé pour les Hindous une portée religieuse, les preuves en abondent. Le brahmane ne mange pas en même temps ni dans le même vase, non pas seulement qu’un étranger ou un inférieur, mais que sa propre femme, que ses fils non encore initiés[3]. Il s’agit si bien ici de scrupules religieux qu’il est défendu de partager la nourriture, fût-ce d’un brahmane, si, par une cause quelconque, encore qu’accidentelle, indépendante de sa volonté, il est sous le coup d’une souillure[4]. Un çûdra même ne peut, sans contamination, manger le repas d’un dvija souillé.

  1. Hearn, p. 32 ; Fustel de Coulanges, p. 182.
  2. Leist, Altarisches Jus Civile, p. 201 suiv.
  3. Mânava Dh. Ç., IV, 43. Apast Dh. S., II, 4, 9, 7 et la note de Bühler.
  4. Vishnu Smriti, XXII, 8-10.