ALBERT MOCKEL
Il fut an des symbolistes de la première heure et surtout un verlainien raffiné et subtil. Au début, son credo dut être le vers de son maître :
La lampe est allumée.
Et blanche, glorieuse, toute parée,
la table est prête pour l’accueil.
Unies au lourd argent légué d’anciennes années,
des roses, l’une à l’autre, en guirlandes sourient,
et le cristal qui fait du vin des pierreries
chante déjà la bienvenue
au maître fatigué qui passera le seuil.
La porte est close ; la chambre est tiède et recueillie ;
il semble que le vol des heures s’y repose.
La Joie, — on le dirait, — aux rires de la clarté
scintille clair parmi les frêles verreries.
Mais n’est-ce un long et lourd effluve de mélancolie
qui monte des profondeurs du parc déserté ?…
Ah ! l’odeur est trop douce, de toutes les fleurs exhalées !
Quelque chose s’étouffe ici, d’irrévélé,
et la croisée, ouverte encore
vers l’ombre aux mirages épars,
attend un front pensif qui ne s’y penche pas.
Tout est calme ;
la terre élargit son sommeil,
et les vents dorment au creux des vallées.
Le ciel se meut, profond d’étoiles.
Sur les cimes du parc, là-bas, sur les plaines,
et jusqu’au fleuve dont les eaux pâles
au plus loin des mers sont allées,
la nuit est un voile impalpable qui plane.
- ↑ Extrait de Chantefable un peu naïve (1891).