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RICHARD WAGNER JUGÉ EN FRANCE

desquels nous avons déjà cité Gérard de Nerval[1] et Th. Gautier, qu’en France les premiers apôtres de la musique de Wagner ont été des écrivains et des poètes, de même qu’au xviiie siècle, toute la gent littéraire s’était divisée en deux camps opposés, les uns, — tels Laharpe, Saurin, Marmontel, Ginguené, champions déclarés de la musique italienne, les autres, comme Suard et l’abbé Arnaud, tenant pour Gluck contre Piccinni.

Wagner, qui, à Zurich, avait interrompu la composition de sa Tétralogie pour écrire Tristan et Yseult, terminé dans l’été de 1859, envoya sa partition au théâtre de Karlsruhe, le grand-duc de Bade étant très bien disposé pour lui. L’auteur aurait eu besoin de se rendre dans cette ville pour vaincre les hésitations de l’intendant et du chanteur Schnorr auquel on destinait le rôle de Tristan.

« Mais, même alors, dit-il dans l’Œuvre et la mission de ma vie, je ne pus réussir à obtenir la permission de rentrer en Allemagne dans ce but. J’étais encore proscrit, avec mon art pour compagnon d’exil, et ne pouvant m’en séparer, je sentis que je devais une fois encore faire appel à un public en dehors de ma propre patrie.

« Alors, en l’année 1860, je me trouvai de nouveau à Paris. Pourtant, la seconde fois, je crus que c’était

  1. G. de Nerval écrivait de Leipsig le 30 juillet 1853 : « Je me sens fort disposé en faveur de la musique et mes théories que je n’expose pas souvent, se rapportent assez à celles de Wagner. » Voir la notice sur G. de Nerval dans le volume de M. Champfleury, déjà cité.