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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

facilement trois à quatre mètres de haut. S’adressant alors brusquement à l’un de ses vieux subordonnés qu’il savait être le chef de la rébellion, il dit :

— « Comment appelle-t-on ces magnifiques plantes ? »

— « Seigneur, ce sont des cannes à sucres. »

— « Il leur faut combien d’années pour atteindre une si belle hauteur ? »

— « Seigneur, il ne leur faut pas plus de six ou sept mois », répondit le vieux fonctionnaire d’un air ironique qui décelait un grand mépris pour l’ignorance du gouverneur.

— « Ah ?  ! vraiment ! s’étonna Kim-Kisou. Eh bien, vous allez me couper une de ces cannes sucre dans toute sa hauteur. »

Le vieux fonctionnaire exécuta aussitôt l’ordre de son chef. Le jeune gouverneur reprit alors d’un ton sévère :

— « Maintenant, vous allez essayer de mettre cette canne dans votre poche, sans la briser ! »

— « Seigneur, c’est une chose matériellement impossible que de mettre une canne de plus de trois mètres dans une poche qui n’a que quelques pouces de profondeur. » Répondit-il visiblement énervé par la naïveté du magistrat.

— « Ah, ah ! vieil imbécile ! éclata tout à coup le gouverneur d’un ton de tonnerre. Une canne à sucre, qui n’a point un an, n’entre pas dans votre poche et vous voulez m’y mettre, moi qui ai plus de 17 fois son âge ! Votre imbécillité est trop forte pour être pardonnée ! Aucun châtiment n’est assez rigoureux pour votre témérité !