Page:Sextus Aurelius Victor - Origine du peuple romain, trad Dubois, 1846.djvu/184

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

gula n’était pas sans quelque fondement de vérité ; en effet, il avait d’abord si bien déguisé ses vices monstrueux, soit par pudeur, soit par hypocrisie de soumission, que l’on répétait partout avec justice, qu’il n’y avait jamais eu de meilleur esclave ni de plus mauvais maître que lui. Enfin, parvenu au pouvoir, et fort habile, comme ces sortes de caractères, à dissimuler les sentiments de son âme, il fit d’abord plusieurs actions agréables au peuple, au sénat et aux troupes : un jour même qu’on lui dénonçait une conspiration, comme s’il eût refusé d’y croire, il dit hautement qu’il était à peine vraisemblable que l’on pût rien tenter contre celui dont l’existence n’était ni à charge ni nuisible à personne. Mais tout à coup il fait périr, par des forfaits divers, un petit nombre de personnes innocentes, et dès lors tel qu’une bête farouche qui s’est abreuvée de sang, il s’abandonne à toute la férocité de son naturel aussi, à partir de ce moment, pendant trois années, il souilla l’univers du massacre toujours nouveau des sénateurs et des citoyens les plus vertueux. À ces crimes il ajoute l’inceste avec ses propres sœurs, et l’adultère avec les plus nobles Romaines ; il s’avance paré du costume des dieux, il se vante d’être Jupiter, à cause de son triple inceste avec ses sœurs ; puis, dans ses orgies et dans ses bacchanales, il affirme qu’il est le dieu Bacchus. Toutefois, au milieu de ses désordres, il rassemble en un seul corps toutes les légions, et leur donne l’espoir de passer en Germanie ; mais bientôt elles reçoivent l’ordre de recueillir, sur les côtes de l’Océan, des coquillages et de petits cailloux : lui-même il préside à cette opération, tantôt revêtit d’une robe flottante et avec les attributs de Vénus, tantôt, armé de toutes pièces, il ne cesse de répéter qu’il emporte, non point les dépouilles des hommes, mais celles des dieux ; sans doute parce qu’il s’emparait de ces sortes de coquillages, que les Grecs, toujours passion-