Page:Sextus Aurelius Victor - Origine du peuple romain, trad Dubois, 1846.djvu/276

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d’usurper le souverain pouvoir. Après avoir tout soumis, tout pacifié, Probus eut l’imprudence de dire, à ce sujet, que bientôt on n’aurait plus besoin de soldats. Vivement irritées de cette parole, les troupes l’égorgèrent, vers la fin de la sixième année de son règne, près de Sirmium, sa ville natale, où il leur avait prescrit, en y creusant des fossés et des canaux, de dessécher les marais formés dans les environs par les pluies d’hiver. Dès lors la puissance militaire reprit tout son ascendant sur l’autorité du sénat, qui, jusqu’à nos jours, est resté privé du droit d’élire les empereurs : on ne sait s’il y renonça volontairement, ou par insouciance, ou par crainte, ou par aversion des troubles civils. Car l’édit de Gallien une fois révoqué, il lui eût été facile de rétablir la discipline militaire, d’après la conduite modérée des légions, sous le règne de Tacite, et Florien n’eût point témérairement usurpé le pouvoir; la soldatesque enfin n’aurait pas osé, suivant son caprice, donner l’empire, même à un citoyen vertueux, si les membres d’un ordre aussi considérable et aussi distingué que le sénat avaient passé leur vie dans les camps. Mais en s’abandonnant aux charmes du repos et à la crainte de perdre leurs richesses, dont ils se flattaient de jouir pleinement au delà même de l’éternité, ils frayèrent aux soldats, j’ai presque dit aux barbares, la voie de la domination et sur eux et sur leurs descendants.

XXXVIII. Carus, Carin et Numérien.

Carus, préfet du prétoire, prend alors les ornements impériaux, et nomme césars ses deux fils Carin et Numérien. Comme les barbares, à la nouvelle de la mort de Probus, avaient jugé le moment favorable pour envahir, chacun de son côté, les provinces romaines, Carus envoie son fils aîné à la défense de la Gaule, et part aussitôt lui-même avec Numérien pour la Mésopotamie, que