Page:Shakespeare, apocryphes - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 2.djvu/199

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SCÈNE IV.

la comtesse.

— Non, c’est le mal pour le mal, et c’est pour l’horreur une éternelle horreur. — Mais puisque la disposition de votre majesté est telle — que ma résistance, l’amour de mon mari, — votre haut rang, aucune considération enfin — ne peut me sauvegarder, puisque votre autorité — domine et épouvante tant de scrupules sacrés, — je soumets mon mécontentement à votre contentement, — et je m’engage à vouloir ce que je ne voudrais pas, — pourvu que vous-même vous écartiez les obstacles — qui s’interposent entre l’amour de votre altesse et le mien.

édouard.

— Indique-les, belle comtesse, et, par le ciel, je les supprime.

la comtesse.

— Ce sont les existences qui s’interposent entre nos amours — que je voudrais voir anéanties, mon souverain.

édouard.

— Quelles existences, ma dame ?

la comtesse.

— Mon trois fois aimable souverain, — c’est la reine, votre femme, c’est Salisbury, mon mari, — qui, vivants, ont droit à un amour, — que nous ne pouvons aliéner qu’après leur mort.

édouard.

— Ton objection est incompatible avec nos lois.

la comtesse.

— Et votre désir aussi. Si la loi — vous interdit de vous rendre à l’une, — qu’elle vous empêche donc de satisfaire l’autre. — Je me refuse à croire que vous m’aimez comme vous dites, — à moins que vous ne prouviez par les actes ce que vous avez juré.