Page:Shakespeare, apocryphes - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 2.djvu/427

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
429
EXTRAIT DE LA CHRONIQUE D’HOLINSHED.

et étant chargé de bagage, pria un certain Bradshaw, orfévre à Feversham, qui était son voisin, de l’accompagner jusqu’à Gravesend, promettant de le récompenser pour sa peine. Ce Bradshaw, fort honnête homme, consentit à monter à cheval avec lui. Et, quand ils arrivèrent aux dunes de Raynham, ils aperçurent trois ou quatre domestiques qui venaient de Leeds ; et en même temps Bradshaw vit arriver sur la colline, du côté de Rochester, un certain Blackwill, terrible et cruel bandit portant une épée et un bouclier, et, avec lui, un autre homme ayant sur l’épaule un gros bâton.

Alors Bradshaw dit à Greene : — Nous sommes heureux, qu’il nous arrive de Leeds de la compagnie, car voici venir à notre rencontre le plus meurtrier coquin qui soit en Angleterre ; sans ce renfort-là, nous aurions eu grande chance de perdre et la bourse et la vie.

— Oui-dà, pensa Greene (comme il l’a confessé plus tard), cet homme fait justement mon affaire.

Et il demanda : — Lequel des deux est-ce ?

— Celui-là, répondit Bradshaw, celui qui a l’épée et le bouclier ; il s’appelle Blackwill.

— Comment savez-vous cela ? fit Greene.

— Je l’ai connu à Boulogne, répliqua Bradshaw. Nous avons tous deux servi là ; lui était soldat ; moi, j’étais attaché à sir Richard Cavendish. Il a commis là beaucoup de vols et de meurtres odieux sur ceux qui voyageaient entre Boulogne et la France.

Sur ces entrefaites ; ils furent rejoints par la bande des domestiques qui fit route avec eux ; et c’est ainsi qu’ils rencontrèrent Blackwill et son compagnon. Les domestiques, qui connaissaient Blackwill, le saluèrent et lui demandèrent où il allait.

Blackwill répondit : — Sangdieu ! (car c’était son habitude de jurer presque à chaque mot), je ne le sais pas et je ne