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SCÈNE I.

Il lit l’énigme :
Je ne suis point vipère, pourtant je me repais
De la chair de ma mère qui n’engendra.
Je cherchais un époux, et, en le cherchant,
J’en ai trouvé la tendresse dans un père.
Lui est père, fils, et bon époux ;
Moi, je suis mère, épouse et pourtant sa fille.
Comment tout cela peut exister en deux personnes,
Devinez-le, si vous voulez vivre.

— Cette condition est bien amère !… Mais, ô puissances, — qui donnez au ciel d’innombrables yeux pour voir les actions humaines, — pourquoi ne se voilent-ils pas d’un éternel nuage, — si cette chose est bien vraie, dont la lecture me fait pâlir ?

Prenant la main de la princesse.

— Beau miroir de lumière, je vous aimais, et vous aimerais encore, — si le mal ne remplissait pas cette splendide cassette ; — mais je dois vous dire… Non, ma pensée se révolte ; — car celui-là est loin d’être un homme parfait — qui, se sachant devant le logis du vice, veut pousser la porte. — Vous êtes une belle viole, dont vos sens sont les cordes ; — touchée de manière à produire sa légitime harmonie, — elle eût attiré à elle le ciel et les dieux, avides de l’entendre ; — mais, maniée avant l’heure, — elle ne fait danser que l’enfer avec sa musique discordante. — En vérité, je ne me soucie pas de vous.

antiochus.

— Prince Périclès, ne la touche pas, il y va de ta vie ; — car c’est là un article de notre loi, — aussi dangereux que les autres… Le temps pour vous est expiré : — ou expliquez l’énigme sur-le-champ, ou subissez votre sentence.

périclès.

Grand roi, — bien peu aiment à entendre les fautes qu’ils aiment à commettre ; — ce serait vous offenser trop grave-