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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 3.djvu/419

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OBERON.

Que l’objet que tu verras, en t’éveillant,
Devienne l’objet de ton amour :
Aime-le et languis pour lui :
Que ce soit un ours, un tigre ou un chat,
Un léopard ou un sanglier à la crinière hérissée.
Qui apparaisse à tes yeux, à ton réveil,
Il sera ton amant chéri.
Réveille-toi à l’approche d’un objet hideux.

(Oberon sort.)

(Entrent Lysandre et Hermia.)

LYSANDRE. — Ma belle amie, vous êtes fatiguée d’errer dans ce bois ; et à vous dire vrai, j’ai oublié le chemin : nous nous reposerons, Hermia, si vous le voulez, et nous attendrons ici la lumière consolante du jour.

HERMIA. — Je le veux bien, Lysandre. Allez, cherchez un lit pour vous : moi je vais reposer ma tête sur ce gazon.

LYSANDRE. — La même touffe de verdure nous servira d’oreiller à tous les deux : un seul cœur, un même lit, deux âmes, et une seule foi.

HERMIA. — Non, cher Lysandre : pour l’amour de moi, mon ami, placez-vous plus loin encore ; ne vous mettez pas si près de moi.

LYSANDRE. — Ô ma douce amie ! prenez mes paroles dans le sens que leur donne mon innocence. Dans l’entretien des amants, l’amour est l’interprète ; j’entends que mon cœur est uni au vôtre, en sorte que nous pouvons des deux cœurs n’en faire qu’un ; que nos deux âmes se sont enchaînées par un serment, en sorte que ce n’est qu’une foi dans deux âmes. Ne me refusez donc pas une place à vos côtés, pour me reposer ; car en me couchant ainsi je ne ments point[1].

HERMIA. — Lysandre excelle à faire des énigmes : malheur à mes manières et à ma fierté, si Hermia a voulu dire que Lysandre mentait. Mais, mon aimable ami, au nom de la tendresse et de la courtoisie, é

  1. Équivoque sur le verbe to lie, se coucher et mentir.