Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 3.djvu/457

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THÉSÉE. — Nous n’en paraîtrons que plus généreux, en les remerciant, sans qu’ils nous aient rien donné. Notre plaisir sera de comprendre ce qui fait le sujet de leurs erreurs. Là où la bonne volonté échoue, un noble cœur considère l’intention, non le mérite de l’action. Dans mes voyages, souvent de grands clercs formaient le projet de me complimenter par des harangues longtemps étudiées ; et, lorsque je les voyais frissonner et pâlir, rester court au milieu de leurs périodes, étouffer dans leur peur leur voix exercée, et pour conclusion rester muets et sans harangue, croyez-moi, ma chère, je cueillais un compliment dans le silence, et j’en lisais autant dans la modestie de leur zèle timide, que dans la bruyante voix d’une éloquence audacieuse et arrogante ; l’affection et la simplicité muette m’en disent donc beaucoup plus que tout ce que je pourrais entendre.

(Philostrate revient.)

PHILOSTRATE. — S’il plaît à Votre Altesse, le Prologue est tout prêt.

THÉSÉE. — Qu’il s’avance.

(On joue une fanfare.)[1].

(Le Prologue entre.)

LE PROLOGUE. — « Si nous déplaisons, c’est avec notre bonne volonté ; il faut que vous pensiez que nous ne venons pas pour offenser, mais par notre bonne volonté, vous montrer notre simple savoir-faire, voilà le véritable commencement de notre fin. Considérez donc que nous ne venons qu’avec dépit. Nous ne venons point comme pour vous contenter ; mais c’est notre véritable intention. Nous ne sommes pas ici pour votre plaisir ; que si vous avez regret, les acteurs sont tout prêts et par leur jeu vous saurez tout ce qu’il y a apparence que vous sachiez. »

THÉSÉE. — Ce garçon ne s’arrête pas sur les points.

LYSANDRE. — Il a galopé son prologue, comme un jeune cheval ; il ne connaît point d’arrêt. Voilà une bonne

  1. Il paraît que le prologue était anciennement introduit au son des trompettes.