Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 5.djvu/45

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de ma cause j’avançais sur lui, peut-être aussi effrayé par le bruit que j’ai fait, il a pris tout soudainement la fuite.

Glocester. – Qu’il fuie tant qu’il voudra, il ne pourra dans ce pays se dérober à la poursuite ; et une fois pris, ce sera vite fait. Le noble duc mon maître, mon digne chef et patron, vient ici ce soir : sous son autorité je ferai publier que celui qui pourra découvrir ce lâche assassin et l’amener à la potence peut compter sur ma reconnaissance ; et pour celui qui le cachera, la mort.

Edmond. – Lorsque j’ai cherché à le dissuader de son dessein, le trouvant résolu à l’exécuter, je l’ai menacé, avec des malédictions, de tout découvrir. Il m’a répondu : « Toi, un bâtard, qui n’as rien au monde, penses-tu, si je voulais te démentir, qu’aucune opinion qu’on eût pu se former de ta probité, de ta vertu, de ton mérite, pût suffire pour donner confiance en tes paroles ? Eh ! non, ce que je voudrais nier (et je nierais ceci, dusses-tu me montrer précisément tel que je suis) tournerait à mon gré contre toi ; j’imputerais tout à tes suggestions, à tes complots, à tes damnables artifices : il faudrait que tu parvinsses à rendre les gens imbéciles, pour les empêcher de penser que les avantages que tu dois tirer de ma mort ont été un aiguillon actif et puissant pour t’engager à la chercher. »

Glocester. – Scélérat endurci et consommé ! Désavouerait-il son écriture ? — Je ne l’ai jamais engendré – Écoutez, voici la trompette du duc : j’ignore pourquoi il vient – Je vais faire fermer tous les ports – Le scélérat n’échappera pas : il faut bien que le duc m’accorde cette grâce – D’ailleurs je vais envoyer son signalement au loin et au près, afin que dans tout le royaume on puisse le reconnaître – Et toi, mon loyal et véritable fils, je vais m’occuper de te rendre apte à posséder mes biens.

Entrent Cornouailles, Régane, suite.

Cornouailles. – Eh bien ! mon noble ami, depuis un instant seulement que je suis arrivé ici, j’ai appris d’étranges nouvelles.

Régane. – Si elles sont vraies, de toutes les vengeances